Cent cinq jours dans un livre. Une guerre et elle seule dans un livre.
Olivier NOREK, Les guerriers de l’hiver, Michel Lafon, 424 pages
Quand un écrivain de polar décide d’écrire sur une guerre méconnue, quand il écrit sur la légende du plus grand snipper au monde, quand il raconte le combat de David contre Goliath, quand il se documente pour toucher le givre du réel de cette Guerre d’hiver, quand il sait comment tendre une lecture, alors vient un livre dont on se souviendra.
Entre octobre 1939 et mars 1940, une guerre oppose l’URSS de Staline à son pacifique voisin, la Finlande. Pendant ce temps, Hitler peaufine d’autres plans d’invasion…Cette « Guerre d’hiver » où les températures touchent les -50 degrés est une guerre presque immobile à se tuer à la mitraillette ou au fusil de précision puis au lance-flamme, au canon et au char.
Le lecteur assiste aux assauts et aux affûts, il est au cœur des tranchées et des tentes, il entend les directives et les dialogues. Cette immersion sur le champ de bataille comme dans les états majors fait réfléchir, car nous savons qu’elle recommence aujourd’hui avec la guerre en Ukraine. Pourtant jamais le texte n’est manichéen.
C’est sans doute grâce à Simo Häyä, surnommé par ses adversaires, « La Mort Blanche », un tireur d’élite. Un vrai personnage de roman, sauf que c’est une vraie personne de la vie. Sa guerre est patriotique au meilleur sens du terme. Ses compagnons sont les voisins de son village. Son chef est un alcoolique suicidaire. Ses adversaires, les snippers « rouges » qu’il abat d’une balle dans le torse.
Des morts. Des blessés. Des mensonges et des manipulations soviétiques. Des diplomaties falotes et sans empathie (la France par exemple). Du courage. De l’amitié. Du respect du corps. Des femmes dans la guerre. Tout y est.
Ce livre c’est la Guerre d’hiver de 39-40 telle qu’on doit la savoir et telle qu’elle semble « renaître » sur les rives de la Mer Noire et de la Mer d’Azov depuis le 24 février 2022 – sans vouloir faire d’amalgame.
Ce livre est aussi – ou presque – ou étrangement – une expérience cinématographique. Sa lecture, impossible à lâcher, a ressemblé à un visionnage qui nous attache au fauteuil. J’imagine qu’un jour un producteur en fera un film…
* Extrait
Le Sisu c’est l’âme de la Finlande. L’état d’esprit d’un peuple qui vit dans une nature sauvage, par un froid mordant, avec un ensoleillement rare. Une vie austère, dans un environnement hostile a forgé leur mental d’un acier qui nous résiste aujourd’hui. Je te dirai que cela parle aussi de leur courage, mais il me manquerait encore beaucoup de mots pour définir ce qu’est le Sisu. Il faudrait y ajouter l’obstination, le cran, la force intérieure, la ténacité, la résistance, la détermination, la volonté…puisqu’ils sont aussi froids et sauvages que le cœur de leurs forêts. »
Par Nadine Brunelot | 26 octobre 2024